法语小说阅读:三个火枪手(17)
-- Mais ils ont correspondu, c’est à lui que la reine a écrit toute la journée ; Monsieur le duc, il me faut ces lettres !
-- Sire, cependant...
-- Monsieur le duc, à quelque prix que ce soit, je les veux.
-- Je ferai pourtant observer à Votre Majesté...
-- Me trahissez-vous donc aussi, Monsieur le cardinal, pour vous opposer toujours ainsi à mes volontés ? Etes-vous aussi d’accord avec l’Espagnol et avec l’Anglais, avec Mme de Chevreuse et avec la reine ?
-- Sire, répondit en soupirant le cardinal, je croyais être à l’abri d’un pareil soup on.
-- Monsieur le cardinal, vous m’avez entendu ; je veux ces lettres !
-- Il n’y aurait qu’un moyen.
-- Lequel ?
-- Ce serait de charger de cette mission M. le garde des sceaux Séguier. La chose rentre complètement dans les devoirs de sa charge.
-- Qu’on l’envoie chercher à l’instant même !
-- Il doit être chez moi, Sire ; je l’avais fait prier de passer, et lorsque je suis venu au Louvre, j’ai laissé l’ordre, s’il se présentait, de le faire attendre.
-- Qu’on aille le chercher à l’instant même !
-- Les ordres de Votre Majesté seront exécutés ; mais...
-- Mais quoi ?
-- Mais la reine se refusera peut-être à obéir.
-- A mes ordres ?
-- Oui, si elle ignore que ces ordres viennent du roi.
-- Eh bien, pour qu’elle n’en doute pas, je vais la prévenir moi-même.
-- Votre Majesté n’oubliera pas que j’ai fait tout ce que j’ai pu pour prévenir une rupture.
-- Oui, duc, je sais que vous êtes fort indulgent pour la reine, trop indulgent peut-être ; et nous aurons, je vous en préviens, à parler plus tard de cela.
-- Quand il plaira à Votre Majesté ; mais je serai toujours heureux et fier, Sire, de me sacrifier à la bonne harmonie que je désire voir régner entre vous et la reine de France.
-- Bien, cardinal, bien ; mais en attendant envoyez chercher M. le garde des sceaux ; moi, j’entre chez la reine. "
Et Louis XIII, ouvrant la porte de communication, s’engagea dans le corridor qui conduisait de chez lui chez Anne d’Autriche.
La reine était au milieu de ses femmes, Mme de Guitaut, Mme de Sablé, Mme de Montbazon et Mme de Guéménée. Dans un coin était cette camériste espagnole do a Estéfania, qui l’avait suivie de Madrid. Mme de Guéménée faisait la lecture, et tout le monde écoutait avec attention la lectrice, à l’exception de la reine, qui, au contraire, avait provoqué cette lecture afin de pouvoir, tout en feignant d’écouter, suivre le fil de ses propres pensées.
Ces pensées, toutes dorées qu’elles étaient par un dernier reflet d’amour, n’en étaient pas moins tristes. Anne d’Autriche, privée de la confiance de son mari, poursuivie par la haine du cardinal, qui ne pouvait lui pardonner d’avoir repoussé un sentiment plus doux, ayant sous les yeux l’exemple de la reine mère, que cette haine avait tourmentée toute sa vie - quoique Marie de Médicis, s’il faut en croire les mémoires du temps, e t commencé par accorder au cardinal le sentiment qu’Anne d’Autriche finit toujours par lui refuser -, Anne d’Autriche avait vu tomber autour d’elle ses serviteurs les plus dévoués, ses confidents les plus intimes, ses favoris les plus chers. Comme ces malheureux doués d’un don funeste, elle portait malheur à tout ce qu’elle touchait, son amitié était un signe fatal qui appelait la persécution. Mme de Chevreuse et Mme de Vernet étaient exilées ; enfin La Porte ne cachait pas à sa ma tresse qu’il s’attendait à être arrêté d’un instant à l’autre.
C’est au moment où elle était plongée au plus profond et au plus sombre de ces réflexions, que la porte de la chambre s’ouvrit et que le roi entra.
La lectrice se tut à l’instant même, toutes les dames se levèrent, et il se fit un profond silence.
Quant au roi, il ne fit aucune démonstration de politesse ; seulement, s’arrêtant devant la reine :
" Madame, dit-il d’une voix altérée, vous allez recevoir la visite de M. le chancelier, qui vous communiquera certaines affaires dont je l’ai chargé.