法语小说阅读:小东西下篇(7)
分类: 法语
时间: 2022-11-08 03:12:43
作者: 全国等级考试资料网
DEUXIEME PARTIE 下篇
Chapitre VII LA ROSE ROUGE ET LES YEUX NOIRS 第七章 红玫瑰和黑眼睛
Après cette première visite à l’ancienne maison Lalouette, je restai quelque temps sans retourner là-bas. Jacques, lui, continuait fidèlement ses pèlerinages du dimanche, et chaque fois il inventait quelque nouveau noeud de cravate rempli de séduction...
C’était tout un poème, la cravate de Jacques, un poème d’amour ardent et contenu, quelque chose comme un sélam d’Orient, un de ces bouquets de fleurs emblématiques que les Bachagas offrent à leurs amoureuses et auxquels ils savent faire exprimer toutes les nuances de la passion.
Si j’avais été femme, la cravate de Jacques avec ses mille noeuds qu’il variait à l’infini m’aurait plus touché qu’une déclaration. Mais voulez-vous que je vous dise ! les femmes n’y entendent rien... Tous les dimanches, avant de partir, le pauvre amoureux ne manquait pas de me dire : “ Je vais là-bas, Daniel... viens-tu ?” Et moi, je répondais invariablement:
“ Non! Jacques! je travaille... ” Alors il s’en allait bien vite, et je restais seul, tout seul, penché sur l’établi aux rimes.
C’était de ma part un parti pris, et sérieusement pris, de ne plus aller chez Pierrotte. J’avais peur des yeux noirs. Je m’étais dit : “ Si tu les revois, tu es perdu”, et je tenais bon pour ne pas les revoir...
C’est qu’ils ne me sortaient plus de la tête, ces grands démons d’yeux noirs. Je les retrouvais partout.
J’y pensais toujours, en travaillant, en dormant. Sur tous mes cahiers, vous auriez vu de grands yeux dessinés à la plume, avec des cils longs comme cela, C’était une obsession.
Ah ! quand ma mère Jacques, l’oeil brillant de plaisir, partait en gambadant pour le passage du Saumon, avec un noeud de cravate inédit, Dieu sait quelles envies folles j’avais de dégringoler l’escalier derrière lui et de lui crier: “ Attends-moi!”, Mais non! Quelque chose au fond de moi-même m’avertissait que ce serait mal d’aller là-bas, et j’avais quand même le courage de rester à mon établi... : “ Non! merci, Jacques ! je travaille. ” Cela dura quelque temps ainsi. A la longue, la Muse aidant, je serais sans doute parvenu à chasser les yeux noirs de ma cervelle. Malheureusement j’eus l’imprudence de les revoir encore une fois. Ce fut fini ! ma tête, mon coeur, tout y passa. Voici dans quelles circonstances :
Depuis la confidence du bord de l’eau, ma mère Jacques ne m’avait plus parlé de ses amours ; mais je voyais bien à son air que cela n’allait pas comme il aurait voulu... Le dimanche, quand il revenait de chez Pierrotte, il était toujours triste. La nuit je l’entendais soupirer, soupirer... Si je lui demandais :
“Qu’est-ce que tu as, Jacques ?” Il me répondait brusquement: “ Je n’ai rien. ” Mais je comprenais qu’il avait quelque chose, rien qu’au ton dont il me disait cela. Lui, si bon, si patient, il avait maintenant avec moi des mouvements d’humeur. Quelquefois il me regardait comme si nous étions fachés. Je me doutais bien, vous pensez! qu’il y avait là-dessous quelque gros chagrin d’amour ; mais comme Jacques s’obstinait à ne pas m’en parler, je n’osais pas en parler non plus. Pourtant, certain dimanche qu’il m’était revenu plus sombre qu’à l’ordinaire, je voulus en avoir le coeur net.
“ Voyons ! Jacques, qu’as-tu ? lui dis-je en lui prenant les mains... Cela ne va donc pas, là-bas ?
- Eh bien, non!... cela ne va pas..., répondit le pauvre gar on d’un air découragé.
- Mais enfin, que se passe-t-il ? Est-ce que Pierrotte se serait aper u de quelque chose ? Voudrait-il vous empêcher de vous aimer ?...
- Oh ! non ! Daniel, ce n’est pas Pierrotte qui nous empêche... C’est elle qui ne m’aime pas, qui ne m’aimera jamais.
- Quelle folie, Jacques! Comment peux-tu savoir qu’elle ne t’aimera jamais... Lui as-tu dit que tu l’aimais, seulement?... Non, n’est-ce pas ?... Eh bien, alors...
- Celui qu’elle aime n’a pas parlé ; il n’a pas eu besoin de parler pour être aimé...
- Vraiment, Jacques, tu crois que le joueur de fl te ?... ” Jacques n’eut pas l’air d’entendre ma question.
Chapitre VII LA ROSE ROUGE ET LES YEUX NOIRS 第七章 红玫瑰和黑眼睛
Après cette première visite à l’ancienne maison Lalouette, je restai quelque temps sans retourner là-bas. Jacques, lui, continuait fidèlement ses pèlerinages du dimanche, et chaque fois il inventait quelque nouveau noeud de cravate rempli de séduction...
C’était tout un poème, la cravate de Jacques, un poème d’amour ardent et contenu, quelque chose comme un sélam d’Orient, un de ces bouquets de fleurs emblématiques que les Bachagas offrent à leurs amoureuses et auxquels ils savent faire exprimer toutes les nuances de la passion.
Si j’avais été femme, la cravate de Jacques avec ses mille noeuds qu’il variait à l’infini m’aurait plus touché qu’une déclaration. Mais voulez-vous que je vous dise ! les femmes n’y entendent rien... Tous les dimanches, avant de partir, le pauvre amoureux ne manquait pas de me dire : “ Je vais là-bas, Daniel... viens-tu ?” Et moi, je répondais invariablement:
“ Non! Jacques! je travaille... ” Alors il s’en allait bien vite, et je restais seul, tout seul, penché sur l’établi aux rimes.
C’était de ma part un parti pris, et sérieusement pris, de ne plus aller chez Pierrotte. J’avais peur des yeux noirs. Je m’étais dit : “ Si tu les revois, tu es perdu”, et je tenais bon pour ne pas les revoir...
C’est qu’ils ne me sortaient plus de la tête, ces grands démons d’yeux noirs. Je les retrouvais partout.
J’y pensais toujours, en travaillant, en dormant. Sur tous mes cahiers, vous auriez vu de grands yeux dessinés à la plume, avec des cils longs comme cela, C’était une obsession.
Ah ! quand ma mère Jacques, l’oeil brillant de plaisir, partait en gambadant pour le passage du Saumon, avec un noeud de cravate inédit, Dieu sait quelles envies folles j’avais de dégringoler l’escalier derrière lui et de lui crier: “ Attends-moi!”, Mais non! Quelque chose au fond de moi-même m’avertissait que ce serait mal d’aller là-bas, et j’avais quand même le courage de rester à mon établi... : “ Non! merci, Jacques ! je travaille. ” Cela dura quelque temps ainsi. A la longue, la Muse aidant, je serais sans doute parvenu à chasser les yeux noirs de ma cervelle. Malheureusement j’eus l’imprudence de les revoir encore une fois. Ce fut fini ! ma tête, mon coeur, tout y passa. Voici dans quelles circonstances :
Depuis la confidence du bord de l’eau, ma mère Jacques ne m’avait plus parlé de ses amours ; mais je voyais bien à son air que cela n’allait pas comme il aurait voulu... Le dimanche, quand il revenait de chez Pierrotte, il était toujours triste. La nuit je l’entendais soupirer, soupirer... Si je lui demandais :
“Qu’est-ce que tu as, Jacques ?” Il me répondait brusquement: “ Je n’ai rien. ” Mais je comprenais qu’il avait quelque chose, rien qu’au ton dont il me disait cela. Lui, si bon, si patient, il avait maintenant avec moi des mouvements d’humeur. Quelquefois il me regardait comme si nous étions fachés. Je me doutais bien, vous pensez! qu’il y avait là-dessous quelque gros chagrin d’amour ; mais comme Jacques s’obstinait à ne pas m’en parler, je n’osais pas en parler non plus. Pourtant, certain dimanche qu’il m’était revenu plus sombre qu’à l’ordinaire, je voulus en avoir le coeur net.
“ Voyons ! Jacques, qu’as-tu ? lui dis-je en lui prenant les mains... Cela ne va donc pas, là-bas ?
- Eh bien, non!... cela ne va pas..., répondit le pauvre gar on d’un air découragé.
- Mais enfin, que se passe-t-il ? Est-ce que Pierrotte se serait aper u de quelque chose ? Voudrait-il vous empêcher de vous aimer ?...
- Oh ! non ! Daniel, ce n’est pas Pierrotte qui nous empêche... C’est elle qui ne m’aime pas, qui ne m’aimera jamais.
- Quelle folie, Jacques! Comment peux-tu savoir qu’elle ne t’aimera jamais... Lui as-tu dit que tu l’aimais, seulement?... Non, n’est-ce pas ?... Eh bien, alors...
- Celui qu’elle aime n’a pas parlé ; il n’a pas eu besoin de parler pour être aimé...
- Vraiment, Jacques, tu crois que le joueur de fl te ?... ” Jacques n’eut pas l’air d’entendre ma question.